À l'image de l'auteur incapable de commencer son œuvre, il est difficile aujourd'hui de se lancer sur un nouveau réseau social numérique (RSN). Manque d'inspiration, méconnaissance des codes, absence de références... Pourquoi se lancer en terrain inconnu ?
Peur de mal faire
Les réseaux sociaux, en général, ne font rien pour arranger les choses : entre sollicitation excessive et fil d'actualités vides, difficile de trouver les premiers mots d'une entrée en matière.
Quoi de neuf ?
J'ai récemment ressenti cette sensation de vide sidéral sur Mastodon. Défense d'une éthique numérique, emballement des médias, enthousiasme généralisé : tout concourait à la création d'un profil sur ce nouveau réseau social.
Une fois entrée, je retrouve mes repères : tout ça ressemble fortement à une interface Tweetdeck mais... sans mon réseau ! J'imite alors les pionniers qui, perdus, ne savent plus quoi faire sinon retourner en parler sur Twitter.
Sur #Mastodon, je comprends pas encore tout, donc je parle pour combler le vide et l'incompréhension.— Vizzie The Kid (@VizzieTheKid) 4 avril 2017
Venez passer vos vacances sur Mastodon, l'air est pur, on peut y passer une journée sans croiser personne, c'est plus vide que la Patagonie.
— Serenity (@404_E_132_4FE27) 15 juillet 2017
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Aide-toi, la communauté t'aidera
Heureusement, Internet existe aussi pour l'aide qu'il (ou elle) nous apporte, pas seulement pour ce qu'on exige de nous - en l'occurrence une productivité accrue en matière de nouvelles intéressantes à partager.
Dans le cadre du TD Valorisation en ligne de projets culturels, à l'université Lumière Lyon II, j'avais demandé à mes étudiants d'utiliser Twitter pendant deux cours d'affilée.
Sachant qu'ils détestent tous Twitter
Le même compte était utilisé par l'ensemble du groupe. Le premier challenge consistait à amorcer une interaction : l'objectif pouvait être une réponse, un retweet ou un favori de la part d'un autre compte. Une fois une petite base d'abonnés acquise, le deuxième challenge visait à entretenir ces relations en relayant des informations pertinentes, en lien avec leurs sujets, sans autopromotion.
Ce qui a aidé les étudiants - et c'était bien sûr l'objet du cours - a été de découvrir le lexique Twitter et d'imaginer comment ils pouvaient se l'approprier.
Par exemple, savez-vous qu'il existe des hashtags pour chaque jour de la semaine, efficaces aussi sur Instagram ? Pour ma part j'apprécie #VendrediLecture qui consiste à partager sa lecture du moment.
Ce genre de codes peut servir d'inspiration pour trouver un contenu à partager (qui ne tombe pas comme un cheveu sur la soupe) ou bien pour "habiller" un message avec une certaine tonalité.
Prendre l'accent local
Un réseau social n'est pas vraiment un langage, c'est plutôt comme une manière de parler. On ne parle pas de la même manière sur Facebook et Whatsapp. Certains réseaux se prêtent davantage au jeu de questions / réponses, d'autres aux contenus multimédias.
C'est pourquoi j'utilise souvent un réseau social pour un projet en particulier. Plus que cela : j'identifie un projet à une interface spécifique.
Quelques exemples :
- pour coordonner l'organisation d'Ardèche Mix Camp, un remix au coeur du patrimoine ardéchois, nous avons utilisé Whaller
- pour recueillir des retours d'expérience en théâtre avec la compagnie Ariadne, nous avons utilisé Pearltrees
- alors que pour faire le même travail de collecte avec les Subsistances, nous allons plutôt utiliser Pinterest
Faire la part des choses
Sur quoi se base le choix de tel ou tel réseau social ? Bien sûr : sur ses fonctionnalités, son réseau existant, son mode de fonctionnement. Ce qui implique de connaître un minimum cet écosystème avant de se lancer - ou bien de se faire guider par quelqu'un qui l'utilise.
L'alternance de plusieurs réseaux, comme toute multiplicité, est bénéfique pour son utilisateur : loin de se cantonner à une seule "bonne" manière de faire, on pourra alors se donner la liberté d'interagir selon la façon la plus adaptée - ce qui est défini par le contexte.
L'agilité est également favorisée : lorsqu'un réseau ne convient plus à l'usage qu'on souhaite en faire, il suffit d'évoluer vers une autre forme. Cette transformation "physique" - car elle est visible, même si virtuelle - peut aider des organisations à prendre conscience de leur changement. C'est le cas actuellement avec Museomix, à l'étroit dans son forum de discussion, qui est en train de migrer une partie de ses contenus vers un Wiki administré en collaboration.
Choisir un réseau, c'est aussi choisir des modalités d'échanges, une manière d'interpeller ou de distribuer - qu'il s'agisse d'informations, d'opinions, de contenus.
Une peur chasse l'autre
Au final, en se lançant sur une multitude de réseaux et en prenant du recul sur sa disponibilité (forcément, on ne peut pas être partout), il me semble que la peur de rater quelque chose (FOMO : Fear Of Missing Out) s'éloigne de nos préoccupations.
Après tout, il ne s'agit que d'une image virtuelle... et les notifications sont là pour nous rappeler à l'ordre !
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Black Mirror, S03E01 |
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