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🐢 annule et remplace 🐢

Un apéro d'automne. Christophe me parle d'un sprint créatif organisé en interne avec son équipe et des services associés. Son collègue a choisi des animaux totems pour représenter les participants : chat, antilope, tortue... Je soupire.



Mais sinon, vous voulez pas choisir des animaux représentatifs de la diversité sur Terre ? Déjà qu'on entend parler tous les jours de la disparition des espèces...
OK, tu proposes quoi ?

Hop ! j'attrape un stylo pour mettre à jour la liste.

D'abord, le nudibranche - alias limace de mer. Les espèces sont tellement belles et variées qu'on voudrait tout de suite plonger avec elles.


Ensuite, le kakapo. Ce perroquet-hibou de Nouvelle-Zélande profite indirectement du réchauffement climatique dans son régime alimentaire.


En troisième, l'aigrette garzette, oiseau typique des littoraux. Son nom en écho suffit à lui donner une place de choix dans notre sélection. En plus, elle remplace avantageusement le traditionnel (et snob) flamant rose.


Je n'ai pas d'objection à garder la tortue mais elle a besoin d'un peu de piquant. Nous optons pour la tortue alligator dont j'ai vu récemment des photos dans le magazine Hobbies. Avec son air féroce, elle fait le lien entre milieu aquatique et milieu terrestre.


Idem pour l'antilope qui appelle à une petite spécification. L'impala emporte la mise avec son apparence gracieuse et son nom hérité des Zoulous.


Il nous faut un dernier animal terrestre, différent des autres. Le tamanoir est élu, tout autant pour sa trompe redoutée des fourmis que pour son panache duveteux.


Hourra ! la liste est validée dans son intégralité.

Il est temps de passer aux illustrations pour les badges. Petit souci : aucun graphiste n'est disponible avant le début du sprint.

Pas de souci, on va aller sur Noun Project et choisir des pictos.

Avec plus de 2 millions d'objets graphiques disponibles en ligne, the Noun Project est une mine d'or pour les gens pressés que nous sommes.

La recherche "kakapo" ne donne aucun résultat. Bon, il fallait s'y attendre... Nous nous rabattons sur "parrot" et choisissons une petite frange évocatrice.


The Noun Project autorise ses utilisateurs à télécharger une illustration en haute qualité gratuitement, à condition de citer son auteur - ce qui correspond tout à fait aux valeurs de la licence Creative Commons CC-BY défendue dans les sprints créatifs et qui met l'accent sur la paternité de la production.

Au fil des recherches, l'aigrette garzette conservera son nom mais adoptera le profil de ce maudit "flamingo" tandis que la tortue alligator rentrera les crocs.

Quelques clics plus tard et voilà ! Les badges sont prêts à être imprimés.


C'est un succès unanime auprès des participants du sprint, à tel point que certains subtilisent discrètement leur badge en fin de journée pour le plier religieusement dans leur porte-feuille et le ramener à la maison.



Pourquoi le choix d'un animal totem a-t-il du sens ?

Tous les jours, je navigue sur une interface ("firefox") dont l'emblème est discuté : est-ce un renard, admiré pour sa "flexibilité légendaire" ou bien un panda roux, menacé de disparition ?

le panda roux n’était pas suffisamment représentatif des valeurs véhiculées par Firefox. 
- source Voici le nouveau logo de Firefox : où est passé le renard ?


Dans la famille Mozilla, quelles sont les valeurs portées par l'artémie (Artemia salina) pour que ce petit crustacé d'eau salée donne son nom à un navigateur éditeur web : SeaMonkey ?

Source : Seamonkey, un navigateur alternatif

Depuis 2013, Google distingue les utilisateurs anonymes d'un document partagé par l'attribution d'un emblème animal.



La liste mêle allègrement animaux réels et animaux fantastiques comme le Kraken, le Chupacabra ou le Nyan Cat (figure mythologique du web). On peut aussi être une citrouille (sic).

Par rapport à notre liste de badges, on trouve la tortue et l'alligator mais pas les deux ensemble. Quant au tamanoir, il apparaît fièrement.

Si le kakapo ne figure pas encore dans la liste d'anonymes de Google, il faisait hélas partie des espèces hautement menacées d'extinction qui ont remplacé le crocodile de la marque Lacoste le temps d'une campagne avec l'IUCN (International Union for Conservation of Nature).

Le programme Save Our Species consiste à produire des séries limitées égales au nombre d'individus vivant dans le monde. La liste des 10 prochaines espèces à aider a été publiée en ligne, il est possible jusqu'en janvier 2020 de proposer des actions à mener en leur faveur.



Alors afficher un kakapo sur son polo Lacoste ou sur son badge de créatif, c'est toujours un pas de plus vers la sensibilisation à la biodiversité ?

Peut-être, mais sans en abuser... Dans cette étude intitulée The paradoxical extinction of the most charismatic animals et parue en avril 2018, les auteurs soulignent l'absence de corrélation entre la population virtuelle d'une espèce animale et sa représentation réelle. Autrement dit, plus on voit un animal dans notre quotidien, plus on a du mal à croire qu'il est menacé.

L'exemple le plus charismatique est celui du lion, le roi des animaux, sous-entendu tous les jours dans ma ville Lyon et visualisé dans des publicités pour des céréales ou des clubs de foot. On verra entre 4 à 5 lions par jour dans notre environnement occidental, ce qui, extrapolé sur une année, représente jusqu'à trois fois plus d'individus que ceux, réels, qui vivent en liberté en Afrique de l'Ouest.


 


Pour les auteurs de cette étude, il reviendrait aux marques bénéficiant d'une image valorisante (comme le lion) de verser des compensations pour la conservation de l'espèce.

Autrement dit, s'engager dans une démarche de préservation des crocodiles pour Lacoste ? C'est exactement ce que défend la marque sur son site web : 

Quand René Lacoste prit le crocodile pour emblème, il ne se doutait pas que 80 ans plus tard, ce logo serait porté par des millions de personnes. Il ignorait également que le crocodile pourrait un jour disparaître. Dans le cadre de sa démarche de Responsabilité sociale et environnementale (RSE), Lacoste contribue à la protection de la biodiversité de la planète en s'impliquant dans la sauvegarde des crocodiles, des alligators, des caïmans et des gavials ainsi que dans la protection et la restauration des écosystèmes dans lesquels vivent ces animaux.

Bien vu !

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